Le 76e RI à travers l’histoire

LE 76ème REGIMENT D’INFANTERIE A TRAVERS L’HISTOIRE

Le Régiment suisse et l’ancien 76 ème

 

La généalogie du 76ème RI se révèle, à l’étude, complexe, le régiment changeant plusieurs fois de dénomination, disparaissant puis resurgissant à plusieurs reprises au cours des âges. Aussi n’est il pas question ici d’entrer dans les détails de son histoire, mais de faire ressortir quelques éléments indispensables à la compréhension de ses origines, et particulièrement le fait que le 76ème est issu de deux régiments créés par l’Ancien Régime, l’un suisse, l’autre italien. En même temps seront soulignés les faits les plus saillants de son histoire.

Le premier régiment qui portera par la suite le numéro 76 est à l’origine un régiment suisse, créé en 1677 à la demande de Louis XIV et qui fut d’abord appelé Régiment Stuppa Jeune. Sous l’Ancien Régime, en effet, les régiments étaient désignés soit par le nom d’une province, soit par celui du colonel propriétaire du régiment.

C’est ainsi que le régiment suisse, de 1677 à 1791, reçut douze noms différents. CHATEAUVIEUX fut celui de son dernier colonel : Jacques André de LULLIN, marquis de CHATEAUVIEUX.

Sous Louis XIV, le régiment se distingua à STEINKERQUE en 1692 lors de la guerre de la Ligue d’Augsbourg, puis à DEWAIN en 1712 lors de la guerre de Succession d’Espagne. Au XVIIIème siècle, il se conduisit encore vaillamment lors de la Guerre de Sept Ans (1753-1760). Mais sous la Révolution, lorsque l’Assemblée Constituante résolut de faire disparaître de l’Armée toutes les traces de l’Ancien Régime, elle ordonna que les régiments au service de la France cessent de porter leurs noms pour n’être désignés que par des numéros. C’est ainsi qu’en 1791 le régiment suisse de Châteauvieux prit le nom de 76 ème Régiment d’Infanterie et le 20 août 1792, les soldats suisses furent renvoyés dans leur pays et remplacés par des français. Puis le 76ème devint la 76ème Demi-Brigade.

Lors des guerres révolutionnaires, la 76ème Demi-Brigade reçut le baptême du feu devant LE CATEAU en 1794, combattit en Belgique, participa à la répression de l’Insurrection vendéenne en 1795 et 1796, et à la défense de KEHL en Alsace en décembre 1796. C’est là que le Drapeau du 1er Bataillon étant tombé aux mains des Autrichiens, le Sergent THERRON se jeta au milieu des ennemis et ramena l’emblème. La 76ème Demi-Brigade se signala encore à HOHENLINDEN lors de la campagne d’Allemagne en 1800.

En 1803, le premier consul BONAPARTE lui donne le nom de 76ème Régiment d’Infanterie de Ligne. Sous le 1 er Empire, le 76ème acquit quelques uns de ses plus beaux titres de gloire, inscrits sur son drapeau. Le Régiment se fait notamment remarquer à la bataille d’ELCHINGEN qui permit la prise d’ULM en octobre 1805. Il est engagé l’année suivante dans la campagne de Prusse, marquée par la victoire d’IENA (1806) et celle de FRIEDLAND en 1807. La même année, le régiment se divise en deux détachements. Un bataillon reste en Allemagne. Il se distinguera à ESSLING et WAGRAM (1809).

Le reste du régiment part pour le sud de la France d’où il prend part à la guerre d’Espagne en 1808 et 1809. Puis il est engagé en 1810 au Portugal à CIUDAD RODRIGO, COÏMBRA, BUSACO. Des centaines d’hommes périssent, la retraite de 1811 est très pénible.

Une partie du 76ème resta en Espagne jusqu’en 1813, puis se replia dans le sud-ouest de la France où les bataillons eurent encore à se battre en 1814 à ORTHEZ de BEARN et à TOULOUSE. En 1815, durant les Cents Jours, le régiment lutta contre les coalisés, en Belgique, puis tenta d’arrêter les troupes de BLÜCHER à MEUDON le 2 juillet.

Mais le 76ème fut licencié sous la Restauration de 1815, et c’est là que s’arrête la filiation suisse du régiment. Il faudra attendre l’année 1855 pour que Napoléon III donne à son tour le numéro 76 à un régiment d’infanterie jusque-là nommé le 1 er Léger. Et c’est de cet autre régiment, second ancêtre du 76ème qu’il faut à présent esquisser l’histoire.

Royal Italien et 1er léger

Ce 1er Léger trouve son origine dans le Régiment Royal Italien composé de mercenaires italiens et levé en 1671 par Louis XIV. Le Royal Italien restera un régiment de ligne participant à toutes les guerres de l’Ancien Régime. En 1788, il est transformé en Chasseurs Royaux de Provence. Puis à partir de 1791, il devint successivement le 1er Bataillon d’Infanterie Légère, qui se distingua en 1792 à la prise de MAYANCE, la 1ère Demi-Brigade de Ligne et en 1803, par un arrêté de Bonaparte, le 1er Régiment d’Infanterie Légère. Ce 1er Léger, embarqué sur deux péniches au large de BOULOGNE résista glorieusement à trois frégates anglaises en janvier 1805. On le retrouve en Espagne de 1803 à 1813, et en Allemagne à BAUTZEN en 1813 également ; enfin à WATERLOO en 1815, six voltigeurs du 1er Léger retranchés dans la ferme d’HOUGOMONT résistèrent jusqu’à la mort à 200 Hanovriens.

Mais le 1er Léger devait aussi être licencié en 1815 et on voit réapparaître en 1820 un nouveau 1er Régiment d’Infanterie Légère. Ce nouveau régiment prit part à la guerre d’Espagne, en CATALOGNE (1823-1827). En 1830, un bataillon prend part au débarquement de STAOUELI, près d’ALGER, marquant le début de la conquête de l’Algérie.

Le nouveau « 76 ème »

C’est à ce 1er Régiment d’Infanterie Légère qu’il reviendra de porter le nom de 76ème Régiment d’Infanterie de Ligne lorsqu’en 1855 se fait le passage des troupes légères aux troupes de Ligne. Le Second Empire lui fournit l’occasion de se distinguer à plusieurs reprises, lors de la campagne d’Italie, notamment le 24 juin 1859 à SOLFERINO, où sa conduite lui vaut d’être décoré de la Légion d’Honneur et de la Médaille d’Or de MILAN, et d’inscrire à son drapeau le nom de cette bataille.

En 1870, le 76ème fut le 16 août à GRAVELOTTE et le 18 août à SAINT PRIVAT, où le 1er Bataillon se distinguera en contre-attaquant les Allemands. Lorsqu’il fut inclus dans la capitulation de METZ, le 18 octobre 1870, le régiment avait perdu plus de trois cents tués en trois mois. Reformé à partir d’un Bataillon de Marche, le 76ème fut engagé au printemps 1871 contre la Commune.

Au cours de la période de paix qui suivit, les bataillons du Régiment furent regroupés ou stationnèrent séparément à PARIS, ORLEANS et COULOMMIERS. A partir de 1902, le 76ème quitta définitivement ORLEANS, tenant garnison à PARIS, avec un ou plusieurs bataillons à COULOMMIERS.

La guerre de 14-18 offrit au 76ème l’occasion d’exploits qui lui valurent deux nouvelles inscriptions au drapeau. Elles commémoreront les luttes sanglantes pour la prise de la butte de VAUQUOIS dans l’ARGONNE, du 17 février au 06 juin 1915, et les combats dans la SOMME, du 23 au 27 septembre 1916, au cours desquels le 76ème réussit une attaque sur une profondeur de plus de 2 kilomètres à l’intérieur des lignes allemandes. La 2ème compagnie parvint à progresser sur 1200 mètres dans les positions ennemies, ce qui lui mérita une citation à l’ordre de l’Armée. En 1917, le régiment prit part à la tentative française de rupture du front dans l’Aisne, entre CRAONNE et BERRY au BAC. Malgré l’échec de cette offensive, le 76ème garda bon moral.

L’année 1918 fut la plus éprouvante, car souvent le régiment se trouva en première ligne, sur l’axe des coups de boutoirs par lesquels les Allemands essayaient d’arracher la victoire : le 22 mars, il fut engagé dans l’Aisne pour barrer la route de NOYON, là où le front s’était effondré entre français et britanniques (ce qui valut au 1er bataillon une citation à l’ordre de l’Armée), du 09 au 14 juin, il supporta le choc d’une offensive dans l’OISE, du 15 au 17 juillet, c’est sur la MARNE entre EPERNAY et CHATEAU THIERRY qu’il fallut enrayer la dernière grande offensive ennemie. Malgré des pertes élevées, le 76ème remplit toujours sa mission. Et lors de l’offensive de la victoire, en octobre 1918, les combats de MONTHOIS dans l’ARGONNE lui coûtèrent encore des centaines de tués et blessés. Durant la Grande Guerre, le régiment perdit au total 2 486 tués, dont 59 officiers.

En 1920, le régiment est dissout et son drapeau déposé au Musée de l’Armée. Il n’est pas reconstitué en 1939. Il faut attendre 1963 pour que le Bataillon Subdivisionnaire de la Seine prenne le nom de 76ème Bataillon d’Infanterie, transformé en 1968 en 76ème Groupement de Place. En janvier 1972, ce groupement reçoit le drapeau du 76ème Régiment d’Infanterie des mains de Monsieur le Président de la République Georges POMPIDOU. Enfin, en septembre 1972, il devint 76 ème Régiment d’Infanterie des Forces du Territoire, et le 1 er août 1979, le Régiment d’Infanterie du 3ème Corps d’Armée.

Après le départ de l’Etat-major du 3ème Corps d’Armée à Lille, le 1er juillet 1984, il est le régiment d’infanterie placé sous le commandement du Général commandant la 11ème division militaire territoriale.

Il sera dissout le jeudi 08 septembre 1988.

Telles sont les complexes origines du 76ème régiment d’Infanterie qui, s’il s’illustra particulièrement dans les grandes batailles des Premier et Second Empires et dans la Grande Guerre n’en fut pas moins présent dans nombre de campagnes qui scandèrent la vie militaire française sous l’Ancien Régime et sous les révolution…

Quoi d’étonnant alors que d’y rencontrer de grands soldats comme MASSENA (qui y servit 18 ans) ou BARAGUEY d’HILLIERS (qui commanda le régiment de 1830 à 1833) et du Lieutenant Charles PEGUY qui, lui, tomba dans les rangs du 276ème Régiment d’Infanterie, régiment de réserve dérivé du 76ème Régiment d’Infanterie, disparu le 04 septembre 1914 à Villeroy, et du Chef de Bataillon MISSERI (Héros du Bataillon de COREE).