1870 : la France est en guerre. Son territoire est envahi. Pour prendre part à la lutte, marsouins et bigors sont, pour la première fois de leur histoire, groupés dans une même division, la division de marine qui sera surnommée la division bleue.
Commandée par le général de Vassoigne, elle est composée de 2 brigades :
la 1ere, général Reboul, est formée du 1er Régiment d’Infanterie de Marine de Cherbourg et du 4eme de Toulon; la 2eme général Martin des Pallières, comprend le 2eme Régiment d’Infanterie de Marine de Brest et le 3eme de Rochefort. Le 1er Régiment d’Artillerie de Marine de Lorient fournit 3 batteries.
La Division bleue fait partie du 11eme Corps d’Armée affecté à l’armée de Mac Mahon. Rassemblée au camp de Chalons, celle-ci, dans la deuxième quinzaine d’août, va tenter la jonction avec l’armée de Bazaine enfermée dans Metz.
Le 20 août, après six jours de marches et de contres-marches harassantes, un de nos corps d’armée s’étant laissé surprendre à Beaumont, la 1ere brigade, celle du général Reboul, doit intervenir, d’ailleurs avec succès, pour le dégager.
Le lendemain 31 août vers midi, c’est l’autre brigade qui est chargée de reprendre Bazeilles que l’ennemi vient d’occuper.
Le général Martin des Pallières enlève sa troupe. L’ennemi est refoulé, mais sa supériorité en nombre et en artillerie lui permet, en multipliant ses attaques, de reprendre pied dans la localité. La mêlée est acharnée; les pertes sont sévères des deux côtés; le général Martin des Pallières est blessé et le village en feu.
Vers 4 heures de l’après-midi, les nôtres ne tiennent plus que les lisières nord du village. C’est alors que la brigade Reboul, conservée jusque là en réserve, est engagée et, avant la tombée de la nuit, Bazeilles est entièrement reprise une nouvelle fois. toujours au prix de combats acharnés.
On s’organise pour la nuit. Seules des grand-gardes, placées aux ordres du commandant Lambert, sous-chef d’état-major de la Division, tiendront la localité. Le commandant Lambert, comprenant que l’ennemi, puissamment renforcé pendant la nuit, va revenir en force, lui tend un piège.
Lorsque, le 1er septembre au lever du jour, les bavarois commencent à pénétrer dans le village, ils croient celui-ci abandonné. Une vigoureuse contre-attaque, menée par 150 marsouins, les surprend et les mets en fuite. Nous sommes à nouveau, et pour la troisième fois, maîtres de Bazeilles.
A ce moment survient un coup de théâtre. Le général Ducrot, qui vient de remplacer Mac Mahon blessé, veut regrouper l’armée et l’ordre est donné d’abandonner Bazeilles.
Ce que l’ennemi n’a pas réussi, la discipline l’obtient : Bazeilles est évacué. Mais le général de Wimpfen, porteur d’une lettre de service, revendique le commandement et, prenant le contre-pied des dispositions de son prédécesseur, ordonne que soient réoccupées les positions abandonnées.
Il faut donc reprendre Bazeilles dont les Bavarois n’ont pas manqué de s’emparer entre temps. De Vassoigne n’hésite pas et sa division, en une seule colonne, s’empare du village pour la quatrième fois, malgré la défense acharnée de l’adversaire.
Le 1er Corps d’armée Bavarois, renforcé d’une division supplémentaire, et appuyé par une artillerie de plus en plus nombreuse, reprend ses attaques qu’il combine avec des manoeuvres d’encerclement, tandis que dans le village se multiplient les incendies.
Luttant à un contre dix, les marsouins, malgré les obus qui les écrasent et les incendies qui les brûlent et les suffoquent, défendent pied à pied chaque rue, chaque maison et chaque pan de mur. Ils ne cèdent le terrain que très lentement infligeant à l’ennemi des pertes sévères. Hélas, celles qu’ils subissent ne le sont pas moins et, ce qui est très grave, les munitions commencent à manquer.
Le général de Vassoigne, toujours très calme, estime que sa mission est maintenant accomplie, que « l’infanterie de marine a atteint les extrêmes limites du devoir » et qu’il ne doit pas faire massacrer une telle troupe, susceptible de rendre encore des services. Vers midi, il fait sonner la retraite.
Cependant le général de Wimpfen veut encore tenter une percée vers l’est. A cet effet, aux environs de 16 heures, il fait appel au général de Vassoigne et se met avec lui, épée en main à la tête des débris dont il dispose.
Balan est en grande partie repris, lorsque sur l’ordre de l’empereur, il fait mettre bas les armes.
La Division bleue a perdu 2.655 des siens, l’ennemi, bien plus du double.