Profitant d’un déplacement professionnel en Inde, le sous-lieutenant (r) Cyril ANDRE a assisté, le 26 janvier 2008 à New Delhi, à la parade de « Republic Day », dont l’invité d’honneur était le président de la République française. Contact a été pris avec le colonel Patrick SERRADELL, attaché de défense à l’Ambassade de France à New Delhi, et le lieutenant-colonel Alain ULM, attaché de défense adjoint Terre. Ce dernier a chaleureusement accueilli le sous-lieutenant ANDRE, lui a présenté dans les grandes lignes l’organisation des forces armées indiennes et lui a prêté des livres sur l’armée et l’Infanterie indiennes.
L’armée de Terre et les forces paramilitaires indiennes
L’inde, qui consacre 2,5% de son PIB à la défense, est dotée d’une armée de Terre professionnelle de 1,3 millions de personnels. Outre l’armée d’active, elle comprend une armée territoriale à base de réservistes possédant quatre types de bataillons : « généralistes », écologiques, spécialisés (chemin de fer par exemple) et « Home and Hearth ».
Ce dernier type de bataillon a la double vocation d’aider l’armée de Terre dans ses tâches sécuritaires au Cachemire et dans le Nord-Est du pays et de contribuer à lutter contre le chômage des jeunes. Il est à noter qu’aujourd’hui, l’armée de Terre indienne souffre d’un déficit de recrutement d’officiers évalué à 11 200 personnels, notamment en raison des rémunérations attractives du secteur privé et des exigences fortes de mobilité.
L’Inde dispose également de forces paramilitaires qui peuvent dépendre du Ministère de la Défense (Rashtrya Rifles, force provisoire reconduite tous les deux ans et rattachés à l’armée de Terre, qui luttent contre la guérilla dans l’État du Jammu et Cachemire), du Ministère de l’Intérieur à vocation régionale (Assam Rifles, force antiguérilla dont les soldats sont encadrés par des unités militaires, et localisée dans les sept États du Nord-Est de l’Inde) ou nationale (Central Reserve Police Forces, Border Security Forces, Indo-Tibetan Border Police, CISF pour protéger les installations sensibles et les personnalités, National Security Guard pour la sécurité rapprochée des VIP…).
L’armée de Terre indienne comprend une vingtaine d’armes et services (infanterie, artillerie, génie, santé…) divisés en six commandements : Nord à Udhampur (Jammu et Cachemire), Ouest à Chandimandir (Chandigarh), Centre à Lucknow (Uttar Pradesh), Est à Calcutta (West Bengal), Sud à Pune (Maharashtra) et Sud-Ouest à Jaipur (Rajasthan) créé en 2005. L’état-major de l’Armée est à Delhi, à quelques centaines de mètres du palais présidentiel et des bureaux ministériels.
Organisation et mission de l’Infanterie en Inde
L’Infanterie indienne telle qu’elle existe aujourd’hui est notamment issue de la fusion en 1895 de trois armées, celles du Bengale, de Bombay et de Madras et de la profonde réorganisation des forces en 1903 qui a entre autres donné lieu à la renumérotation des régiments. Certains des régiments de l’armée indienne trouvent donc leurs origines dans les formations de l’époque coloniale britannique voire française, d’autres, de constitution plus récente, ont été formés depuis l’indépendance du pays.
En 2003, les bataillons d’Infanterie ont été réorganisés et renforcés (ajout d’une section commando), leur armement a été modernisé et les capacités de surveillance, communication et mobilité ont été améliorées.
Une division d’Infanterie est composée de 15 500 fantassins et de 8 000 éléments d’appui (artillerie, génie…), soit 3 à 5 brigades d’Infanterie, un régiment blindé et une brigade d’artillerie. Une brigade d’Infanterie est elle-même constituée de trois bataillons d’Infanterie. Les « régiments indiens » sont en réalité des entités de gestion administrative, ils assurent le recrutement, la formation et la gestion des différents bataillons qui la composent. Ces bataillons, qui correspondent à nos régiments, sont aux ordres d’un colonel et comptent 900 à 1 100 hommes répartis en plusieurs compagnies.
L’Infanterie représente aujourd’hui un tiers des effectifs de l’armée de Terre indienne et est employée principalement pour des missions de protection du territoire aux frontières et de lutte anti-terrorisme, notamment au Jammu et Cachemire ainsi qu’au Nord-Est du pays. Elle participe en outre aux opérations des Nations Unies. Ses éléments ont par exemple contribué aux opérations de maintien de la paix en Somalie, Rwanda, Angola, Sierra Leone et plus récemment au Liban, Éthiopie, Érythrée et au Congo. L’infanterie indienne prend également part à des opérations civiles intérieures et intervient en cas de catastrophes naturelles (tremblements de terre, inondations…).
L’Ecole de l’Infanterie indienne
L’Infantry School est le plus grand et le plus ancien centre de formation militaire en Inde. Elle trouve ses origines dans la School of Musketry fondée en 1888 à Changla Gali (aujourd’hui au Pakistan). Après avoir changé plusieurs fois de nom et de localisation (Small Arms School à Faizabad, Batlle School for Tactics and Administration à Dehradun…), l’École a finalement été implantée sur le site actuel de Mhow en 1948 (dont certains disent que le nom signifierait Military Headquarters Of War). Un second site, situé à Belgaum, héberge quant à lui les cours de chef de section et la formation commando. Chaque année, plusieurs milliers de personnels suivent un cursus au sein de cette formation, qu’ils soient fantassins, militaires, policiers ou étudiants étrangers d’armées amies.
L’Infantry School est une école qui dispense des cours de commandement pour les officiers et de combat (tireur d’élite, mortier, lutte anti-char…), mais aussi un centre de développement, d’analyse et d’évaluation des doctrines d’emploi et des tactiques de combat. Elle est également en charge de la préparation des manuels d’Infanterie et conduit des tests d’armement, d’équipements et de munitions.
Sur le site de Mhow, sont également localisés le Military College of Telecommunication Engineering (MCTE) qui forme les soldats et officiers dans les techniques des communications et les systèmes d’informations, ainsi que l’Army War College, fondé en 1971 sous le nom de College of Combat, qui dispense les cours de tactique et logistique interarmées. L’École d’Infanterie assure également l’entrainement du National Shooting Team (équipe de tir militaire et sportif) dans le cadre de l’Army Marksmanship Unit (AMU) qui y a été transféré en 1981.
L’Infanterie au défilé de Republic Day
Tous les ans, l’Inde célèbre l’entrée en vigueur de sa constitution le 26 janvier 1950 (l’indépendance du pays a été acquise le 15 août 1947). Les troupes défilent sur le Rajpath, la voie royale de New Delhi qui relie le palais présidentiel « Rashtrapati Bhavan » à l’India Gate (arc de triomphe qui rend hommage aux 90 000 soldats indiens tombés pendant la première guerre mondiale et la guerre d’Afghanistan de 1919). Suite à la guerre indo-pakistanaise de 1971, une flamme dédiée au soldat inconnu brûle continuellement sous l’arche.
En raison de la richesse des traditions indiennes, le défilé, qui comporte une partie militaire et une autre civile, est particulièrement riche en couleurs et en formes. Il comprend le survol des tribunes par des hélicoptères et avions de chasse, le passage de matériels d’appui et de soutien (ponts mobiles, radars, missiles…) et de mêlée (chars, véhicules légers…), des troupes à pieds, à cheval et à dos de chameau, ainsi que des chars colorés présentant la Marine et l’Aviation au moyen de maquettes. Plusieurs chars symbolisent différents États et ministères du pays et les enfants des écoles ont clôturé la marche.
L’Infanterie a été représentée à plusieurs titres lors de ce défilé. D’abord les véhicules : Carrier Mortar Tracked et Infantry Combat Vehicle BMP – IIK qui sont utilisés par les fantassins. Ensuite, la fanfare du Régiment Parachutiste et le 5/8 Centre d’Entraînement des Gurkha Rifles. Enfin, plusieurs éléments des Régiments d’Infanterie :
- le Punjab Regiment (régiment ancien dont les origines remontent à 1761 et dont certains bataillons ont participé à des missions de l’ONU à Gaza et en Angola),
- le Grenadiers Regiment (régiment d’Infanterie possédant le plus grand nombre de décorés du Param Vir Chakras, équivalent de la prestigieuse Victoria Cross),
- le Rajputana Rifles (trois de ses bataillons se sont particulièrement illustrés lors de la Seconde Guerre Mondiale au sein de la 4ème Division Indienne),
- le Sikh Light Infantry Regiment (dont les origines remontent aux Pionniers Sikh levés en 1857 et principalement constitués des Sikh Mazhabi et Ramdasia ; les Sikh conservent les cheveux longs qu’ils couvrent de leur turban),
- l’Assam Regiment (régiment jeune mais prestigieux dont les bataillons se sont entre autres illustrés lors de la Seconde Guerre Mondiale, la guerre indo-pakistanaise et les opérations de maintien de la paix onusiennes au Sri Lanka et au Cambodge ; ses soldats sont réputés efficaces en terrain montagneux et en jungle),
- le Mahar Regiment (forces qui trouvent leurs origines au 17ème siècle sous l’Empereur Shivaji et qui sont spécialisées depuis 1946 dans le service des mitrailleuses légères).